Carnaval - 1958, Métro - 1975

On note une curieuse similitude entre ces deux compositions réalisées à 17 ans d'intervalle. Tout dans le thème les oppose : la folie heureuse du Carnaval tranche avec la morne attente du Métro. D'un côté, la fête est au rendez-vous, de l'autre l'ennui pèse lourdement sur les passagers de la rame... Pourtant nous retrouvons dans les deux tableaux jeux de chapeaux, dentelles, rayures et carreaux, et les lignes de force de ces deux compositions se font écho à défaut de se ressembler tout à fait.

Carnaval - 1958, Métro - 1975 - lignes de construction
Lignes de construction

Le format des deux toiles est légèrement différent comme l'indique l'encadrement bleu ci-dessus (Métro : 12F (61/50)). Mais les lignes de constructions (en rouge) sont très voisines même si certaines d'entre elles sont légèrement déplacées ou amplifiées.

Le cadrage serré du Carnaval enferme six personnages cachés sous des masques grotesques, expressionnistes et figés alors que la fête bat son plein (confettis et spirales de papier). N'était le personnage au loup et au chapeau pointu, les autres personnages sont fixes, les bras le long du corps… Là où l'on s'attendrait à une joie aux mouvements désordonnés, on les trouve dans la même posture contrainte que les voyageurs du Métro.

 

Dans le Métro, dix personnages se tassent comme ils peuvent dans l'encadrement. L'un dort, l'autre lit, un autre encore patiente les yeux dans le vague, un enfant au masque blanc émerge comme s'il peinait à respirer... C'est la folie du métro qui impose de se presser les uns contre les autres en restant indifférents les uns envers les autres ou en feignant de l'être.

À la folie du Carnaval, où les hommes cachent leur identité sous des masques, Aliquot juxtapose la folie du Métro où chacun reste en lui-même, "sous son masque social" pourrait-on dire. À la joie effrénée du Carnaval dont l'ennui existentiel est souvent le terreau, Aliquot juxtapose l'ennui des obligations sociales et humaines (le travail, les transports en commun) dont le Métro constitue ici une illustration.


haut de page